J’ose le dire : j’aime mes vacances.
Je vous mets dans le contexte : je suis instit.
Là, dans votre tête, un flot d’images passe : la blouse grise de l’instituteur de l’ancien temps, un homme respecté du village. Puis très vite s’estompent ces images jaunies pour laisser place à celles beaucoup plus actuelles de ces paresseux de fonctionnaires, toujours en vacances, souvent en grève, en train de se plaindre de leurs conditions : les parents ceci, le ministre cela, l’inspecteur blabla, les syndicats gnangnan, et les enfants, ce n’est plus c’que c’était… Bref, le mode « café du commerce » avec une teinte de « hein, ma bonne dame… ».
La réalité ? Elle n’existe pas. Il y a des réalités.
Ces jours-ci, une annonce a été faite par le Ministre de l’Éducation Nationale pour reporter la journée de pré-rentrée prévue initialement le 29 août. Cela a été présenté dans les médias comme une demande des enseignants (depuis, ces-derniers ont crié, ô grand jamais, qu’ils n’avaient pas réclamé de ne pas travailler en aôut…), puis affiché comme une nécessité informatique de début de contrat (vous comprenez, on a survécu au bug de l’an 2000, mais on a peur du passage du 31 août au 1er septembre pour quelques fonctionnaires).
Le message qui est retenu au niveau global : « les enseignants sont tous des fainéants, il refusent de travailler en août ». Pour beaucoup de professeurs, ce fut une ombre à leur image : on les présente encore comme des paresseux toujours prêts à pinailler sur des détails, surtout quand il s’agit de leur avantage principal, les vacances !
Eh bien souffrez, ou jouissez, à votre convenance, que j’enfonce un peu le clou dans ce sens : je suis ravi de cette journée supplémentaire de vacances. Les mois de juillet et d’août sont des pépites dont je savoure, depuis ma tendre enfance, les instants ensoleillés, reposés, insouciants, déconnectés de l’école… Alors nous faire reprendre un vendredi 29 août, c’est un peu comme finir un puzzle dont il manque une pièce, ou retirer un demi-point à un 20/20… Il manque quelque chose qui agit sur l’ensemble du tout.
Je suis très heureux de cette préservation de mon mois d’août, et je paierai consciencieusement ma journée due, moi le pauvre enseignant à qui on a déjà raboté par petites doses mon beau mois de juillet (a)doré.
Arrêtons donc, dans la profession, de vouloir nous affranchir des clichés. Tous mes collègues, et moi le premier, aimons les vacances prolongées, les récréations au soleil, les élèves calmes au travail, les parents souriants de voir leur enfant heureux. Ce n’est pas pour cela qu’on est paresseux, et que pendant la récréation (ensoleillée), on n’est pas en train de trouver une solution pour le petit Kévin qui perd pieds dans sa classe… Ce n’est pas non plus pour ces raisons que lorsqu’on rencontre des problèmes de fatigue, de communication, de réussite des élèves, de gestion de groupe, on ne se démène pas pour faire correctement notre métier.
D’ailleurs, à tous ceux qui envient ma situation professionnelle, osez le concours ! C’est facile d’entrer, paraît-il, et l’Éducation Nationale recrute…
Ah, sinon, pour le détail : certes, je suis ravi d’être encore en vacances le 29 août, mais je serai ce jour-là en tong et en short, dans ma classe, pour préparer mes étiquettes, mes affiches et mon matériel…
6 commentaires
Au-delà des frontières… Il y a deux ans, sur mon blog : http://www.swissideasinbulk.ch/tag/vacances/
Hahaha quel plaisir de te lire, ça faisait longtemps.
Tu as bien raison et je suis sûre que tout le monde le pense mais personne ne le dit.
Moi j’ai aussi tout compris, je suis en vacances toute l’année.
Si tu veux descendre dans le sud avant ta rentrée tu es le bienvenue
@Claire : j’aime ces comparaisons entre les activités cérébrales et le mode « veille » des ordinateurs… La déconnexion totale n’est pas toujours évidente !
@Lidwine : dans le fond, j’ai peut-être choisi le mauvais métier
A bientôt certainement, je te rejoindrais bien pour faire un peu de marche…
Donc tu es pour rattraper cette pré rentrée après la rentrée des élève s mais tu seras quand même au boulot ce jour là. Désolé mais je ne comprends pas la logique…
Moi aussi je les aime bien ces « grandes » vacances… Rattraper ? Et toutes ces heures à recevoir des parents inquiets (ou non), à emmener les enfants à des cérémonies les jours « fériés », à aller faire les courses pour les marchés de Noel ou autres fête des mères/pères, à nettoyer les pots de yaourt pour tel bricolage(parce qu’à la maison on ne doit plus manger de yaourts tant il est difficile d’obtenir ça dans les familles)….bref tout ça c’est cadeau !
@Xavier @Menu : quand je parle de rattrapage, je parle de la journée avec les élèves qui, elle aussi, a été décalée. En effet, notre pré-rentrée aura lieu le lundi, qui devait être travaillée avec les enfants.
Je suis bien conscient que ce plaisir est purement symbolique : entre venir le 29 août parce que c’est obligatoire, ou y venir parce que j’ai le choix d’y être ou non, il y a une vraie différence d’approche, même si dans les faits, c’est très ressemblant !